Journée Internationale Tolérance Zéro aux MGF 2017

Rapport Évaluation

Projet de Lutte Contre les Violences Faites les Femmes et aux les Filles

APROFES/IAMANEH

Le Sénégal s’est inscrit résolument dans la traque et la répression des violences faites aux femmes et aux filles bien qu’avec des limites et manquements notables, depuis plus de 30 ans. Déjà le Code de la famille adopté sous la loi n° 72-61 du 12 juin 1972 venait mettre fin la répudiation : une des formes de violences les plus humiliantes pour la femme mariée, en proclamant l’exigence de la condamnation de cette acte le plus souvent ou presque toujours associé à des formes extrêmes ; malgré des compromissions avec les traditions d’aliénation et de soumission presque absolues de la femme à l’homme et à la communauté.

Toutefois, il conviendrait de remarquer que le Code malgré ses avancées, n’a pu ni régler les problèmes de la répudiation et encore moins les violences inouïes qui s’exerçaient sur les femmes et les filles considérées à la limite, comme des bêtes humaines taillables et corvéables selon les désidératas des hommes. Ces derniers ayant en nombre de contrées du milieu rural comme du milieu périurbain et des quartiers populaires, presque comme qui dirait ‘’droit de vie et de mort sur elles’’. Le cas échéant, ils bénéficiaient d’une grande tolérance et/ou compréhension de la part d’une société où la culture avec son socle de base patriarcal était fortement ancrée et structurait toutes les relations entre les hommes et les femmes dites relations sociales de genre.

Et les malheurs et les luttes et autres formes d’expressions revendicatives des femmes contre les violences qu’elles subissent au quotidien, de continuer. Les suicides des femmes pour des raisons jamais explicitées et souvent après traitements dégradants, humiliants et inhumains par leurs conjoints, frères, beaux frères, voisinage, etc., les viols et autres blessures physiques et morales à n’en plus finir, de continuer comme avec droit de cité.

Petit à petit, les revendications et ripostes des femmes, de plus en plus articulées aux Déclarations, Recommandations, Résolutions, Conventions, Protocoles et lois internes (Mexico75, CEDAW 1979, Nairobi 1985, CDE 1989, CADBE 1990, Protocole de Maputo 2003, le Code Pénal dans ses articles 294 à 305, la Loi de Janvier 1999, la constitution du Sénégal qui protège l’intégrité physique des citoyens.etc.), d’émerger, de s’affirmer et de prendre date.

Et le Sénégal de s’y mettre en élargissant et complétant son arsenal juridique répressif pour faire face aux violences faites aux femmes et aux filles. C’est ainsi qu’est venue la loi 9901 de janvier 1999 qui définit et réprime le viol, l’inceste, la pédophilie, les violences conjugales, les mutilations génitales féminines (MGF), etc., jusqu’à adhérer et adopter presque tous les Textes et Conventions Internationales, Protocoles, Déclarations stipulant la répression de toutes les formes de violences et de discriminations contre les femmes. A part quelques Conventions du BIT telles la C189 et la Recommandation 201 sur les travailleuses domestiques et le travail décent, la C183 sur la Protection de la Maternité, mais également sur les travailleurs/ses à responsabilité familiale et également toutes les Conventions sur l’agriculture qui sont tous des textes sérieux quand à la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles relativement aux pires formes de travail des enfants.

Dans l’arsenal juridique interne du Sénégal, on peut rappeler entre autres, la loi 2005-06 du 10 mai 2005 relative à la lutte contre la traite des personnes et la protection des victimes, harmonisant la législation nationale du pays avec le Texte de la CEDEAO, la loi 2005-18 du 05 aout 2005 relative à la santé de la reproduction, mais aussi et surtout, le décret n°2006-1331 du 25 novembre 2006 consacrant à la femme salariée travailleuse du public comme du privé naguère considèrée comme mineure, la possibilité de prendre en charge médicalement son conjoint et ses enfants. Il conviendrait d’y ajouter la loi 2008-01 du 08 janvier 2008 qui octroie une autonomie fiscale complète à l’épouse, suite à une pression insistante des femmes travailleuses syndiquées (sur leurs syndicats (UDEN notamment) afin que ces derniers engagent la lutte jusqu’à terme ; ce qui fût fait.

En fin sont venus compléter et confirmer tout cela, la loi du 28 mai 2010 consacrant l’égalité absolue hommes/femmes dans les instances totalement ou partiellement électives et son décret d’application n° 2011-819 du 16 juin 2011 combinés au fait que la nouvelle constitution du Sénégal, dès son Préambule reconnait clairement que tous les Textes auxquels le Sénégal a adhéré ont force de Loi Constitutionnelle et sont supérieurs aux lois nationales, la CEDAW/CEDEF, CDE, CADBE et Protocole de Maputo notamment. Ainsi, le Sénégal s’est doté d’un arsenal et d’un environnement juridiques favorisés par certaines pratiques du pays mais également et plus encore, par le mouvement revendicatif des femmes des années 90 que l’APROFES, le COSEF, l’AJS et Article19 ont perpétué, encore que le COSEF semble marquer le pas ces dernières années (?).

Toutefois, malgré ces avancées notoires en matière de lois et de protection créant un environnement juridique favorable à la promotion des droits des femmes et des filles de toutes les tranches d’âges, les violences faites aux femmes et aux filles n’ont jamais cessé d’aller crescendo. Le choix en 2013 du Président du Sénégal Macky Sall par le Secrétaire Général des Nations unies Ban Ki-Moon pour le Parrainage du Programme de la Communauté Internationale sur la Lutte contre les Violences faites aux Femmes et aux Filles, n’y a pas beaucoup pesé, surtout du fait d’un manque notable de volonté politique, bien que les discours et engagements pour les arrêter ou diminuer très fortement fassent partie des sermons quotidiens des autorités politiques du pays, depuis belle lurette.

Ainsi, pour ne pas remonter très loin, de 1998 à 2014 les violences de toutes natures contre les femmes et les filles ont continué de croitre chaque année. De 1998 à 2009 et plus dramatiquement encore les années 2007 et 2008 ont été particulièrement rudes au Sénégal pour les femmes et les filles du point de vue du respect et de la protection de leurs droits reconnus et ratifiés par l’Etat tant au travers des Conventions, Traités et Déclarations ratifiés au niveau International et Africain, que de la législation nationale avec tout un arsenal juridique marquant une rupture inauguré par le Code de la Famille, consolidé par la loi de Janvier 1999 sur les Violences faites aux femmes et aux filles, la pédophilie, le viol, les violences domestiques, etc. L’ONG GRAVE (Groupe de Recherche et d’Action contre les Violences Faites aux Enfants) a mené entre Septembre 2006 et Septembre 2007 par une revue de la presse, une étude d’où il ressortait que 400 cas de viols (soit plus d’un par jour) ont été enregistrés en une année au Sénégal. Les cas mentionnés ne faisaient référence qu’aux données publiées par les journaux et ne portaient que sur une seule forme de violence : la violence sexuelle (le viol). Au Centre d’Ecoute de l’APROFES il ressort :

Tableau Récapitulatif des Cas de Violences Dénoncés, Enregistrés et Traités au Centre d’Ecoute de APROFES sur 5 ans[1]

Année Nombre de cas reçus au

Centre d’Ecoute de L’APROFES[2]

2009 184
2010 187
2011 203
2012 222
2013 231
2014 116

[1] Le nombre cas reçus du fait de violences sur les femmes et les filles n’as cessé d’augmenter les 5 dernières années, la période du Projet APROFES/IAMANEH qui a démarré en 2011 comme  seule activités prenant en charge les VFF/VBG, y est incluse et a connu un taux d’accroissement plus fort que pour les 2 années qui ont précédées son démarrage.

[2] Parmi ces cas,  35 femmes et filles (15%) ont été reçues plusieurs fois pour des raisons diverses, entre autres :persistance des défauts d’entretien et des violences morales, polygamie, non-respect des engagements pris par le mari, maltraitance des enfants non pris(e)s en charge du mari. Il ressort une augmentation de 25% des personnes reçues au centre, de 2009 à fin 2013. Pour 2014, les données ne concernent que le premier semestre jusqu’en mai.

 

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